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 Par Arnold Lagémi 

L’histoire ne revient jamais sans changer d’apparence. Mais elle revient ! Le terreau nationaliste et antisémite de la vieille droite française a-t-il disparu avec la Libération de la France et les grands procès qui ont suivi ou a-t-il pris un chemin de traverse,  incongru, singulier mais tout aussi dangereux ?

Le grand conducteur de la droite nationaliste monarchique et antisémite française fut, sans conteste, Charles Maurras, que de Gaulle admira pour un temps et dont Pierre Boutang, cet homme de la droite nationaliste et, néanmoins sioniste catholique, dut se détacher partiellement en 1955, précisément en raison de l’antisémitisme maurassien. Peut-on affirmer, sans crainte d’être naïf que cette force considérable aux assises établies depuis 1789 a disparu avec celui qui, condamné à la perpétuité à la Libération pour haute trahison, s’écrira, à la lecture du verdict : « C’est la revanche de Dreyfus ! »

L’influence du fondateur de l’Action Française fut considérable en France et à l’étranger. Il sut rallier à sa nouvelle définition du nationalisme des hommes aussi modérés que le philosophe démocrate chrétien,  Jacques Maritain et les jeunes intellectuels dont il s’entoura parvinrent même  à s’ouvrir à des philosophies libérales, comme à celle du …Juif Henri Bergson. Par son ouverture au « classicisme moderne, » Maurras s’attira l’adhésion de Lucien Moreau, attaché à une tradition progressiste, ex anarchiste qui déclarait « ne pas être Chrétien. » La nouvelle vision de la réalité politique de Maurras séduisit même le communiste Claude Roy, confirmant que l’influence de Maurras à gauche fut effective.  Je cite ci-après le témoignage de deux grands intellectuels Français qui nous aideront à prendre la mesure de l’influence, sans précédent de Maurras sur l’esprit du temps qui, de la droite à la gauche fut d’un tel embrasement que, notre temps ne saurait s’en être complètement détaché.

« Maurras nous apportait l’exemple, exaltant à nos âges, du combat à contre-courant, de l’affirmation minoritaire, d’une intraitable énergie intellectuelle, du refus de tout compromis dans la pensée et dans l’action et aussi une méthode politique, un réalisme – les nations existent, les forces existent, la survie des sociétés humaines n’est possible qu’à un certain prix et sous certaines conditions, on ne peut vouloir ceci ou cela qu’en acceptant les conséquences » Thierry Maulnier

« C’est à Maurras et à Nietzsche (…) que je dois d’avoir été débarbouillé du romantisme et introduit à la connaissance du coeur humain, au classicisme qui me défendait également contre le chatoiement de la fresque hégélo-marxiste et les odeurs de sève du fascisme » Jacques Laurent.  (VOULOIR 26/5/2007 MAURRAS)

L’antisionisme, manifestation probante de la perversion changeante de l’antisémitisme, que n’aurait probablement pas renié Maurras et qu’on retrouve dans toutes les écoles de pensée européenne, mais plus particulièrement au sein d’une certaine gauche, semble indiquer que l’héritage antisémite de Maurras a quitté son terreau naturel de droite pour émigrer vers une autre gauche européenne, dont le discours antisioniste ne dissimule pas les accents maurassiens. La rapidité avec laquelle dans  cette gauche mondialiste, d’origine européenne, on est passé du pro sionisme enthousiaste (jusqu’en 67) à l’antisionisme systématique,  confirme la préexistence d’une imprégnation   anti juive, imputable, en grande partie,  à l’action Française (on ne voit pas qui d’autre) et à son fondateur, porte parole d’un antisémitisme conquérant, sans concession, et à l’influence dépassant les limites de l’hexagone.   La proximité de la Shoah ayant  réduit au silence son ascendant, ce que  les ignorants et les naïfs mirent au crédit d’une disparition illusoire.

Mais, s’il en est ainsi, la droite européenne est-elle toujours liée à l’héritage du père de « l’Action Française » ? Ne se voit-elle pas imposer une succession maudite, dont elle ne voudrait  pas ? Si, d’aventure, elle aurait renié ce patrimoine sulfureux, elle aurait grand intérêt à le proclamer haut et fort. Elle lèverait ainsi l’hypothèque de l’antisionisme partial.  Sinon, les craintes à son égard se maintiendraient  parce que le bon sens l’imposerait.

 

Une Réponse à “ET SI L’HERITAGE DE MAURRAS N’ETAIT PLUS A DROITE ?”

  1. Redomier dit :

    Certes Maurras n’était pas un philosémite même si sa formation idéologico-politique , l’ Action Française a sauvé des Juifs , occasionnellement, pendant la guerre .

    Charles Maurras se posta à l’opposé d’un Judaïsme qu’il ne pouvait pas comprendre tout imprégné qu’il était d’un catholicisme aveuglé par l’image du martyre de Jésus et de celle des Juifs , cristallisée par des siècles d’ enseignement de haine et de stupides préjugés .

    Surtout ,grand disciple du penseur allemand Nietzsche , il ne pouvait que reprendre sa conception d’une morale des maitres et d’une morale des esclaves contraire au message symbolique et hautement pédagogique de Pessah ,alors que sa représentation grecque d’un monde cyclique ,baptisé avec emphase l’Eternel Retour ,n’aurait laissé aucune place à la résurrection d’Israël , à l’émergence , à l’heureuse surprise ….issue …. du providentiel devenir et au sursaut de la subjectivité juive conscientisée et arc-boûtée à son antique projet messianique .

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