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 Durant presque deux mille ans d’exil, marginalisés par les mesures vexatoires de la chrétienté, les Juifs devinrent asociaux,  se déshabituant  des conditions et des réflexes  qui permettent à tout groupe ou collectivité de s’intégrer à la vie commune.  Leur statut fut assimilé à celui de véritables parias. La gestion des affaires publiques leur était interdite et la plupart des emplois ou offices proposés par l’Administration leur était refusée. Parmi ces possibilités, figurait, bien naturellement,  le métier des armes qui, en Europe chrétienne était très lié avec le pouvoir royal, tout comme le clergé. C’était l’alliance du « sabre et du goupillon. »

 La notion de tradition est très attachée à l’armée, que celle-ci serve un monarque ou la République. Il suffit de faire quelques pas sous le dôme des Invalides à Paris pour s’en convaincre  à la vue des anciens drapeaux pris à l’ennemi, devenus de véritables reliques. Les Juifs ignorèrent donc tout un monde fait de panache, ciselé de devises incantatoires, véritables exorcismes destinés à alimenter le courage et la bravoure du chevalier des temps modernes.  Ces sentences ou maximes qu’on peut encore lire au fronton des écoles militaires, ne concernèrent les Juifs que dans la deuxième partie du XIXème siècle. Le cas du capitaine Dreyfus est tout à fait exceptionnel. L’armée, refuge des aristocrates déchus, était restée méfiante à l’égard de ces « nouveaux Français. » 

Les Juifs méconnurent donc le  respect dû au drapeau et à l’uniforme. Tout cet environnement proche d’un authentique rituel qui permettait  de susciter   un tel oubli de soi même, que mourir au combat n’était rien, à  condition que le « passage » s’opérât aux accents du clairon, de la  cornemuse, etc… Cette ambiance d’exaltation de la valeur militaire et de l’héroïsme faisait dire aux détracteurs d’Israël, que les Juifs ne pratiquant pas l’art de la guerre méconnaissaient la fierté d’être homme.

Cette règle communément admise qui établit qu’une armée ne peut être victorieuse que préparée, initiée par l’exemple des Anciens, le renouveau militaire de la conscience nationale juive y échappa,  ainsi qu’à d’autres fatalités,  auxquelles il sut se soustraire,  à la stupéfaction des observateurs. Car,  les  exemples les plus récents qui accompagnèrent les initiatives de la Hagana, première armée juive constituée lors des péripéties de la Guerre d’Indépendance de 1948, datent de la lutte contre l’envahisseur romain au 1er siècle de notre ère… « Savoir se battre » pour les Juifs relevait donc du mythe.

L’absence de traditions militaires n’empêcha pourtant pas, la Hagana, devenue Tsahal (Tsva Hagana Léisraël d’écraser l’offensive arabe. Qu’est ce à dire ? Que retrouvant sa terre, le peuple juif y regagna aussi certains caractères spécifiques dont la capacité à se défendre ? Peut être, mais la brutalité de l’aspect irrationnel choque notre appréhension cartésienne de la réalité, pas toujours dépourvue de vérité.

Ce qui fait d’abord la valeur d’une armée c’est la motivation de ses soldats. Or, les « soldats » de la Hagana savaient qu’un échec entraînerait la disgrâce de tout le mouvement sioniste et contraindrait les survivants à mourir sur place ou à  retourner en Europe, ce dont il ne saurait être question.

Tout comme ces héros de la conscience nationale retrouvée surent renouer avec l’aptitude à l’art de la guerre qui, pour regrettable qu’il fût, n’en reste pas moins garant de la survie d’Israël, viendra aussi le temps où la finalité du sionisme s’imposera au peuple juif, comme le départ du renouveau universel, car Israël retrouvant sa place, les Nations recouvriront la leur. C’est, peut-être là, le sens de l’obligation, selon Maïmonide, de croire que l’histoire des hommes a un sens, ce qu’il assimilait à l’ère messianique !

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