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   Par

Arnold Lagémi,

 

Hébergé par Thérèse Zrihen-Dvir

Couverture de la brochure "André Malraux à l'Assemblée nationale"

L’amitié proclamée d’André Malraux pour les Juifs et Israël ne souffre ni la suspicion ni les soupçons déplacés. Ses attachements, ses positions sont connues. Son désir de former une brigade pour aider militairement Israël en 1956 en est une des illustrations. Une ombre, toutefois plane sur le géant qui affirma précisément : « l’homme n’est pas qu’un tas de secrets, l’homme est d’abord ce qu’il fait. »

Les réserves qui vont suivre sont d’autant plus pénibles à l’auteur de ces lignes qu’il a connu et rencontré l’illustre ministre d’Etat, dont de Gaulle disait : « Je sais que, dans le débat, quand le sujet est grave, son fulgurant jugement m’aidera à dissiper les ombres. (Mémoires d’espoir: le Renouveau. Plon 1970.)

Comment comprendre, en effet, que l’auteur de la «condition humaine, » favorable au sionisme, ne se rendit jamais en Israël ? Comment accepter que l’ami de Chagall qui prononça un discours, (véritable anthologie et plaidoyer de l’identité juive,) en 1960, pour le centenaire de l’Alliance Israélite Universelle, ne se soit jamais rendu sur place pour mesurer impact et portée du sionisme ?

Mais surtout, par quel biais est-il possible d’expliquer son silence pendant et après la fameuse conférence de presse de 67 où de Gaulle, après avoir évoqué « les  conditions plus ou moins justifiables  de  l’implantation des Juifs au milieu de peuples arabes qui lui étaient foncièrement hostiles » prononça des paroles fatales, qualifiant les Juifs de « Peuple d’élite, sûr de lui-même et dominateur » à propos desquelles, Raymond Aron disait : « Le général de Gaulle a sciemment, volontairement, ouvert une nouvelle période de l’histoire juive et peut être de l’antisémitisme. » (de Gaulle, Israël et les Juifs, Plon 1968.)

Quand on sait les combats engagés par Malraux depuis la période indochinoise, la guerre d’Espagne, la Résistance, ses interventions partout où la liberté était menacée. Quand on a lu les textes de sa première femme, Clara Goldsmith où elle soutenait que son mari se situait en deçà de toute possibilité antisémite, bref quand on connaît Malraux, on ne comprend pas, on ne comprend plus son silence, parce que,  si la perspective antisémite lui était inconnue, ne lui était pas plus familière celle d’un antisionisme, contradictoire avec d’autres prises de position à ce sujet.

Et pourtant, il s’est tu ?

André Malraux observant un mutisme farouche aux propos de De Gaulle ne peut s’expliquer par la fidélité indéfectible à de Gaulle. Ce serait faire injure à celui qui parcourut le monde pour prendre le parti de l’opprimé. Une seule raison, un seul motif s’imposent comme réponse à notre question. Malraux était un familier de la Boisserie, la maison du général à Colombey. Il était le seul à ne pas avoir besoin d’invitation pour visiter le général. Tout laisse à penser que, dans ces conditions, il savait ce que tout le monde ignorait : la France continuait d’aider Israël, en dépit des propos du général. Seule cette raison peut expliquer le silence de celui que jamais rien ni personne ne put faire taire quand il jugeait qu’il devait parler pour soutenir ou condamner.

Arnold Lagémi,

http://therese-zrihen-dvir.over-blog.com/

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