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King_Solomon1Désolé pour la longueur du texte, mais affirmer que les Juifs sont royalistes par vocation, demande, pour le moins, une explication.

J’ai bien conscience que le titre de cette réflexion pourrait laisser croire qu’il vise à raviver un idéal suranné, voire à exalter une page rétrograde d’un passé à jamais révolu.

Il n’en est rien.

Et si d’aucuns persistent dans cette vision, c’est qu’ils s’imaginent la monarchie d’Israël, bien plus proche de la caricature que de la définition authentique, fondée * sur la conscience morale du roi et non sur un privilège lié au nom ou à la naissance.*

Quand on fait état de la monarchie, on ne peut empêcher que surviennent en notre esprit un défilé de clichés qui, de Louis XI à Louis XIV en faisant un détour par notre temps, vers Buckingham Palace, par exemple, nous éloignent radicalement de ce que la civilisation hébraïque entend quand elle évoque la réalité royale.

Car si Israël a une vocation royale, ce que nous allons tenter de démontrer, cette dernière procède d’une conception du pouvoir politique où *la morale révélée au Sinaï en reste l’assise et en détermine le mode de fonctionnement.*

Le retour des Juifs sur leur terre, serait, dans cette perspective, la première étape d’un cheminement qui devrait amener, après bien des vicissitudes, à la restauration du trône de David. Le dessein paraît éloigné certes, mais l’accélération des évènements qui a permis à la même génération de subir l’enfer concentrationnaire tout en bâtissant un Etat démocratique autorise à relativiser les notions d’éloignement ou de proximité.

L’essentiel, pour l’heure est à la définition de la vocation politique juive. D’ailleurs, y en t-il une ? Sans le support historique, l’identité juive est amputée d’une de ses dimensions majeures, à savoir, le libre et plein exercice des obligations nationales, lui conférant la possibilité de prendre place et d’assumer sa condition, dans ce qu’il est convenu d’appeler le concert des nations.

Si le gouvernement des Juifs revêt aujourd’hui un aspect quelque peu similaire à celui des Nations, dites libres, il ne faut pas perdre de vue que cette similitude est une donnée d’importation pour ne pas dire d’assimilation. La royauté, instituée depuis Schaül, restant, du point de vue de la vocation d’Israël, l’éthique politique privilégiée dont le statut n’a jamais été abrogé.

Qu’en est-il de la législation, à ce sujet, dans l’Israël d’aujourd’hui ?

Israël n’a pas de constitution. Le texte fondateur est la Déclaration d’Indépendance. Ce document est essentiel, cependant, car il confirme le « droit naturel et historique » du peuple juif à « proclamer la fondation de l’Etat Juif dans le pays d’Israël qui portera le nom d’Etat d’Israël. »

Concernant la nature démocratique du pouvoir politique, il est seulement dit :

« Nous déclarons qu’à compter de la fin du mandat, à minuit, dans la nuit du 14 au 15 mai 1948 , et jusqu’à ce que des organismes constitutionnels régulièrement *élus* entrent en fonction, conformément à une Constitution

http://fr.wikipedia.org/wiki/Constitution

 qui devra être adoptée par une Assemblée constituante d’ici le 1er octobre

http://fr.wikipedia.org/wiki/1er_octobre 1948

, le présent Conseil agira en tant qu’Assemblée provisoire de l’État et que son propre organe exécutif, l’administration nationale, constituera le gouvernement provisoire de l’État d’Israël. »

La Déclaration confirme enfin, comme pour préciser sous quels auspices, cet Etat entend se situer : « Confiants en l’Eternel Tout Puissant….. » Nous observerons que la proclamation l’Etat d’Israël se fondant sur des « droits historiques » indique la volonté d’intégrer l’histoire dans le nouvel Etat. Or, la royauté est partie intégrante de cette histoire et, je le redis, n’a jamais été abolie.

Nulle part ne sont précisés, la forme, le statut politique que choisira le nouvel Etat, République, Monarchie constitutionnelle, etc… comme si, les contours définissant son identité relevaient, pour l’heure, du précaire ou du provisoire. Par contre, le caractère juif de l’Etat est rappelé sans concession : « Nous proclamons la création d’un Etat Juif en terre d’Israël qui portera le non d’Etat d’Israël » L’affirmation soutenue que cet Etat, s’identifiera à la Nation Juive, est un élément déterminant dans notre analyse, car, d’une part, il intègre l’héritage historique sans restriction et de plus, il implique, sans exception, les données identitaires de l’Etat. Or, histoire juive et Etat Juif nous renvoient à l’implication de la royauté si nous posons la question de la forme que revêt dans la société ainsi définie, le pouvoir politique.

Il est, singulier de noter que la plupart des pionniers ou des bâtisseurs de l’Etat ne cachaient pas leur laïcité, parfois agressive. Et dès lors qu’il s’est agi d’asseoir les bases de l’Etat juif, ils se sont comportés comme si l’acceptation de l’héritage juif était globalement confirmée, voir revendiquée sans préalable sélectif ou volonté patente d’avantager l’approche non traditionnelle et laïque de la définition d’Israël.

Manifestement, l’idée qu’on se fait de la royauté écarte cette dernière de la possibilité d’envisager l’exercice du pouvoir politique. L’éthique politique n’en connaît, cependant, pas d’autre, ou plutôt n’en reconnaît pas d’autre. Même si durant des décennies le gouvernement israélien conserve sa forme actuelle, sa nature et son fonctionnement ne sont pas constitutifs de la nation juive. Et si l’on veut saisir une des approches permettant d’ébaucher l’éthique de cette vocation, il faut d’abord faire un grand ménage, c’est-à-dire *évacuer tout ce que nous savons sur la fonction royale, telle que nous l’a enseignée l’histoire de la monarchie en Occident*. Car, il faut bien reconnaître qu’affirmer le principe de gouvernement reposant sur un monarque ne va pas dans ce qu’il est convenu d’appeler le sens de l’histoire. Et pourtant…

Le roi se dit en ivrit Melekh, mot composé de trois lettres mèm (m) lamed (l) Kaf (ke ou he). Ces trois lettres commencent les mots moah, (cerveau) lèv (cœur) et Kaved (foi) Le roi en Israël, c’est d’abord un homme choisi. Parvenu sur le trône parce que capable de conférer à la condition humaine un aboutissement et une plénitude par l’unité des trois organes porteurs d’une symbolique.

Ce sera d’abord un homme dont la spiritualité et les connaissances seront telles qu’il sera choisi. Nous observerons que le messie sera précisément appelé roi messie. Ce sera d’abord et essentiellement un homme ! Il n’y a pas de royauté dans les nuages ! Vous l’avez compris le grand ménage est nécessaire !

Cet aboutissement des péripéties politiciennes n’est, certes, pas pour demain. Mais qui aurait dit au début de la seconde guerre mondiale que dix ans plus tard, le foyer national juif cèderait la place à l’Etat d’Israël, sur la volonté de l’ONU ?

L’organe politique étant défini, quelle serait la définition d’une politique juive conforme à la continuité de son histoire, quand bien même interrompue par deux mille ans d’éloignement qu’il serait possible d’initier sans attendre. De quelle nature devrait-elle être pour préparer l’avènement royal même si celui-ci se ferait attendre.

D’abord la nécessité de revenir à une conception du droit, telle que définie par la Loi de Moïse certes, mais surtout, telle que le message prophétique en a été l’illustration. C’est le retour de la Justice rendue à Israël qui préparera l’avènement royal. (Même en français ne dit-on pas « rendre » la Justice) Chaque fois que la Knesset vote une loi spécifique à la nation juive, non antinomique au regard de la Thora, cette loi initie l’avènement royal.

Affirmer le sionisme, c’est réactualiser la revendication du patrimoine historique, c’est donc affirmer la nécessité d’une Loi du Retour comme source fondamentale du droit hébraïque. Dans cette perspective, même les athées devraient s’y retrouver, car si l’essence du prophétisme a sa source au niveau de la transcendance, son application est envisageable sans référence obligatoire au divin. La Constitution de la République Française proclame la laïcité. Toutefois, l’héritage chrétien est loin d’en avoir été chassé.

Avant 1948, l’impossibilité d’exercer une politique juive conforme à l’ambition hébraïque avait privé la nation judéenne de démontrer que s’il se trouve un seul domaine où la moralité peut et doit faire la preuve de sa validité, ce ne peut être que dans les domaines contradictoires, voire antinomiques. Or, l’exercice de la politique, dans la mesure où c’est l’activité, par excellence, où les tentations sont les plus vives pour escamoter le droit à l’avantage du profit, demeure le champ à cet enjeu. Si le peuple Juif est le peuple qui a enseigné la justice au monde, c’est là surtout qu’il doit démontrer sa capacité à faire cohabiter des forces qui se repoussent.

On comprend mieux pourquoi, tout au long de l’histoire, la perspective d’un retour d’Israël a été vécue par les Chrétiens d’abord, comme source d’une inquiétude profonde.

Comme la source du droit, doit dans cette optique être d’inspiration prophétique, les hommes politiques doivent faire preuve de cohérence en osant soutenir que la politique israélienne s’inscrit dans la continuité de l’histoire d’Israël. Un grand pas aura été fait. Dans la cohérence de cette vision, devra être réfléchie toute tentation d’offrir, aux Palestiniens, la moindre parcelle de terre, support incontournable de l’identité hébraïque.

Le retour sur la terre, loin d’être un aboutissement demeure surtout et d’abord un point d’ancrage à partir duquel les données culturelles associées à l’Ethique politique pourront se réaliser. Un enseignement allégorique affirme que le premier homme devait vivre mille ans et que, suite à la faute, Adam n’aurait vécu que jusqu’à neuf cent trente ans. De tels âges paraissent invraisemblables. Pourtant, (les physiciens comprendront*) selon le deuxième principe de la thermo dynamique, plus on s’éloigne de l’origine, plus il y a entropie, c’est-à-dire désordre, et perte d’énergie. Dans cette optique, les âges avancés par les textes sacrés ne seraient pas dépourvus de vraisemblance !*

Mais que veut-on surtout nous enseigner là ? La faute d’Adam a été une rébellion envers D.ieu. Il convenait donc, par rapport à la faute du premier homme et, conformément au principe qui soutient que doit être remis en ordre ce qui a été délibérément voué au désordre, que pût survenir un homme qui réparera la faute d’Adam.

Ce dernier voulut substituer sa volonté au Ciel. Il fallut donc que naisse un homme qui, d’une part rattrapera la faute d’Adam, en faisant de la volonté du Ciel, la Loi des Hommes. Et naquit David, le premier roi qui fit de la Thora, la Constitution de l’Etat Judéen. *Ne pensez surtout pas à la théocratie. Elle est aussi étrangère aux idéaux Juifs que pourrait l’être l’idolâtrie*. Et, précisément David mourut à…70 ans !!! Le temps nécessaire fut pris à Adam et accordé à David.

Si nous sommes loin, très loin de la renaissance de la royauté, il n’est pas plus fantaisiste d’espérer son retour que n’a été chimérique de dire avec Hertzl, « Im trtsou, lo agada » ; « si vous le voulez, ce ne sera pas un rêve.

Arnold Lagémi     therese-zrihen-dvir.over-blog.com

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