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 Plusieurs correspondants s’étonnent de me voir « livrer combat contre des statues muettes. » Quand je m’interrogeais, il y a peu sur le « surcroît de matière grise chez les Juifs » je  devais être sous le coup d’un sentiment euphorique incontrôlé, car ne pas voir la signature de la bêtise, dans de tels propos, c’est du coup, avoir un « bandeau devant les yeux. » 

Car ces statues ne sont pas muettes. Elles parlent. Elles ont même le redoutable pouvoir de raconter l’histoire des Juifs. De Strasbourg, en l’occurrence. La statue  représentant « la synagogue déchue » m’a même expliqué pourquoi, une tradition séculaire imposerait aux Juifs Strasbourgeois de jouer aux cartes la nuit de Noël. Parce que, me dit-elle, elle se rappelle avoir vu, après la Messe de minuit, les Chrétiens se diriger d’un pas décidé vers le quartier juif afin de s’y livrer à des exactions diverses. Et les hommes, afin de ne pas s’endormir jouaient aux…cartes et pouvaient  ainsi protéger leurs familles.

 Elle me raconta aussi le martyr de ces pauvres Juifs qu’on traînait jusqu’au parvis de la cathédrale pour les faire abjurer avant le sacrifice suprême ou de ces innombrables autodafés où l’on brûlait talmuds et livres Juifs. 

Soutenir que ces statues sont muettes, c’est ne plus croire dans la force des symboles et des emblèmes. Ne pas vouloir les obliger à témoigner en apposant à proximité un panneau qui expliquerait ce que les Juifs ont enduré, c’est laisser telle quelle l’infamie qu’elles suggèrent  sans la correction que la justice impose. 

Si l’Eglise après Vatican II n’avait pas affirmé et soutenu avec force qu’elle regrettait les crimes commis en son nom, il n’y aurait pas lieu à changer quoi que ce soit. 

Mais tel n’est pas, tel n’est plus le cas. Il faut donc accorder le geste à la parole. Laisser, certes ces statues, en l’état,  mais expliquer pour le présent et l’avenir, que tout ce à quoi elles ont assisté représente une des pages les plus sombres de l’histoire des relations entre Juifs et Chrétiens. 

Car ces statues parlent. La dernière fois que je les ai entendues, elles me disaient ne pas comprendre comment et pourquoi les Juifs n’entreprenaient rien qui corrigeât leur présence, modifiât leur signification ou expliquât pourquoi le risque d’entendre de nouveau le cri des suppliciés devenait nul parce que l’Eglise avait demandé pardon et modifié son attitude. 

 Et, avant de se taire, « la synagogue déchue » eut le temps de murmurer : « Si les statues ne parlaient pas, Abraham aurait-il détruit celles que fabriquait son père ? »

 

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